L’art, ou l’acte même de création, la volonté de traduire et
d’exprimer quelque chose, se fait avec plaisir avant tout.
Il faut écouter ses intuitions, parce que le travail artistique peut être un moyen de « sortir » et de comprendre ce qui arrive autour de, et en soi.
Les choses les plus intéressantes sont celles qui se nourrissent de l’intime, qui sont personnelles à chacun. Ce n’est pas facile de se cerner soi-même, et encore moins de prendre le recul nécessaire pour juger son travail quand on a puisé dans ses propres émotions. C’est pourquoi il est important de s’interroger d’abord sur soi, avant de s’interroger sur quoi faire.
Annabel Aoun Blanco et moi-même partageons cette idée.
J’ai eu la chance de rencontrer Annabel sur Lille, de passage dans la région pour le vernissage de l’exposition commune à laquelle elle a participé à la Galerie Quai 26 et qui était visible jusque fin mai.
Nous nous sommes retrouvées un soir d’avril devant l’hôtel de ville, avant de nous installer dans un café afin d'échanger pleinement autour de son travail, de parler un peu de l’art, beaucoup de la photo, et de partager, surtout, un peu de nous.
Il faut écouter ses intuitions, parce que le travail artistique peut être un moyen de « sortir » et de comprendre ce qui arrive autour de, et en soi.
Les choses les plus intéressantes sont celles qui se nourrissent de l’intime, qui sont personnelles à chacun. Ce n’est pas facile de se cerner soi-même, et encore moins de prendre le recul nécessaire pour juger son travail quand on a puisé dans ses propres émotions. C’est pourquoi il est important de s’interroger d’abord sur soi, avant de s’interroger sur quoi faire.
Annabel Aoun Blanco et moi-même partageons cette idée.
J’ai eu la chance de rencontrer Annabel sur Lille, de passage dans la région pour le vernissage de l’exposition commune à laquelle elle a participé à la Galerie Quai 26 et qui était visible jusque fin mai.
Nous nous sommes retrouvées un soir d’avril devant l’hôtel de ville, avant de nous installer dans un café afin d'échanger pleinement autour de son travail, de parler un peu de l’art, beaucoup de la photo, et de partager, surtout, un peu de nous.
Annabel Aoun Blanco,
ou quand l’image questionne la perception dont on en a.
« Ce qui importe
dans mon travail » me dit Annabel, « c’est l’image et le questionnement qu’elle suscite chez le spectateur ».
Mais si l’image, esthétiquement, peut se suffire à elle-même, le fond des sujets qu’elle traite et la découverte ou la compréhension des dispositifs qu’elle met en place pour la réalisation de ses projets, ne peut se comprendre clairement qu’après un temps de lecture. Elle m'explique en effet que « les procédures mises en place prolongent le temps de lecture nécessaire au décodage de l’image afin de permettre une double découverte progressive : d’abord celle du corps, puis celle du dispositif qui l’enserre ou le déforme. L’image ne révèle pleinement son sens et sa spécificité qu’une fois le « procédé d’illusion » identifié ».
« Les Insectes », de petites vidéos présentées sous la forme d’une installation et exposées en 2011 au Festival Gamerz d’Aix en Provence, superposent différentes positions de corps sur lesquels elle a peint des bandes de couleurs. Assemblées et animées ensuite, ces positions prennent ensemble la forme d’un insecte articulé.
Vous pouvez retrouver ici la vidéo de l’interview qu’elle a accordée au Festival Gamerz et dans laquelle elle présente son œuvre.
Mais si Annabel utilise pour « Les Insectes » des médiums informatiques pour arriver à « la vision plastique » qu’elle a de son idée, son travail évolue vite vers une intervention directe sur la réalité pour la modeler à sa guise.
Ainsi, elle m'explique explorer l’apparence de la figure humaine en la soumettant à différentes contraintes qui déforment ou fragmentent son intégrité, tout en révélant certains aspects troublants de sa représentation. « Par exemple, dans les séries « Danse contemporaine » et « Danse contemporaine II » les corps sont prisonniers d’une surface liquide qui semble se confondre avec la paroi (celle du lieu d'exposition) sur laquelle les corps sont présentés (...) L'imaginaire ne peut s’empêcher de reconstituer par-delà l’écran liquide, l’intégrité du corps que le fluide a dérobé. Dans la série « En suspens », l’élément liquide appliqué au visage humain déplace le portrait photographique vers un « ailleurs », un domaine de gestation situé à mi-parcours entre la vie et la mort ».
Mais si l’image, esthétiquement, peut se suffire à elle-même, le fond des sujets qu’elle traite et la découverte ou la compréhension des dispositifs qu’elle met en place pour la réalisation de ses projets, ne peut se comprendre clairement qu’après un temps de lecture. Elle m'explique en effet que « les procédures mises en place prolongent le temps de lecture nécessaire au décodage de l’image afin de permettre une double découverte progressive : d’abord celle du corps, puis celle du dispositif qui l’enserre ou le déforme. L’image ne révèle pleinement son sens et sa spécificité qu’une fois le « procédé d’illusion » identifié ».
« Les Insectes », de petites vidéos présentées sous la forme d’une installation et exposées en 2011 au Festival Gamerz d’Aix en Provence, superposent différentes positions de corps sur lesquels elle a peint des bandes de couleurs. Assemblées et animées ensuite, ces positions prennent ensemble la forme d’un insecte articulé.
Vous pouvez retrouver ici la vidéo de l’interview qu’elle a accordée au Festival Gamerz et dans laquelle elle présente son œuvre.
Mais si Annabel utilise pour « Les Insectes » des médiums informatiques pour arriver à « la vision plastique » qu’elle a de son idée, son travail évolue vite vers une intervention directe sur la réalité pour la modeler à sa guise.
Ainsi, elle m'explique explorer l’apparence de la figure humaine en la soumettant à différentes contraintes qui déforment ou fragmentent son intégrité, tout en révélant certains aspects troublants de sa représentation. « Par exemple, dans les séries « Danse contemporaine » et « Danse contemporaine II » les corps sont prisonniers d’une surface liquide qui semble se confondre avec la paroi (celle du lieu d'exposition) sur laquelle les corps sont présentés (...) L'imaginaire ne peut s’empêcher de reconstituer par-delà l’écran liquide, l’intégrité du corps que le fluide a dérobé. Dans la série « En suspens », l’élément liquide appliqué au visage humain déplace le portrait photographique vers un « ailleurs », un domaine de gestation situé à mi-parcours entre la vie et la mort ».
Pour intervenir directement sur la réalité, Annabel Aoun
Blanco crée donc « des dispositifs comme
une mise en scène. Cela prend énormément de temps, et c’est souvent une
performance physique, le corps est poussé à ses limites ». Dans un
état de contrainte, de souffrance et de vulnérabilité, les gens ne sont alors
plus en représentation devant l’objectif, et la photographie va figer un
instant de cette expérience. Elle m’explique qu’il y a un avant, un après, et ce qu'elle a figé. « L’expérience est
traduite en une photo. C’est pour cela que le temps de lecture est important
pour comprendre ce qui s’est passé ».
Pour sa série « Immersion », présentée au Festival Court Métrange de Rennes en 2013, Annabel me dit s’être inspirée de Méliès dont la base des trucages était d’assembler deux images réelles pour en créer une fausse. Elle ajoute : « la déformation de sa propre image est réalisée par la personne elle-même quand elle a soufflé dans l’eau ». A la différence de « En suspens », « l’élément liquide joue ici un rôle majeur. Ni chape, ni linceul, ni surface opaque et plane, il masque autant qu’il crée ».
Pour sa série « Immersion », présentée au Festival Court Métrange de Rennes en 2013, Annabel me dit s’être inspirée de Méliès dont la base des trucages était d’assembler deux images réelles pour en créer une fausse. Elle ajoute : « la déformation de sa propre image est réalisée par la personne elle-même quand elle a soufflé dans l’eau ». A la différence de « En suspens », « l’élément liquide joue ici un rôle majeur. Ni chape, ni linceul, ni surface opaque et plane, il masque autant qu’il crée ».
Ce qui intéresse Annabel, c’est en effet ce qu’elle va réussir à faire apparaître à partir d’une disparition.
Dans sa série « Avatars » exposée à la galerie Quai 26, elle a redessiné les contours de visages embrumés ; des contours comme un entre-deux traduisant la rencontre du visage et du dessin. « Le trait du dessin sert tout autant à identifier le modèle en découvrant certaines parties, qu’à lui imprimer une latéralité contre-nature, comme l’effectuerait une machine automatisée, créant ainsi une similitude avec les croquis anthropomorphiques de la police et les avatars stylisés du monde virtuel ».
Le processus est toujours le même, mais un nouveau personnage voit le jour à chaque fois. « De façon paradoxale, les visages de chaque couple sont d’autant plus singuliers qu’un processus d’uniformisation leur a été appliqué ».
"Avatars"
Travail photographique et réflexions.
Quand on découvre les photographies d’Annabel Aoun Blanco,
ce qu’on peut constater, c’est le rapport qu’entretiennent la représentation des
corps et des visages avec les entités qui les habitent. Partant du constat que « tout processus de création
plastique appliqué à la personne humaine tend vers une forme de séduction
générant des « apparences », lesquelles voilent, sinon se substituent
à la réalité intrinsèque des êtres qu’elles représentent », Annabel se joue des codes pour tromper le
spectateur et l’amener à se questionner à la fois sur l’image, mais aussi et
surtout sur le sujet.
Le corps n’est pas un outil, contrairement à ce qu’on pourrait penser de prime abord, Annabel l’utilise pour traiter du rapport qu’il entretient à l’image.
Son travail s’inspire et s’inscrit pleinement dans la réflexion photographique. Ses images parlent en effet de la photographie, pour les réflexions plus subtiles qu’elles activent. Elle m’explique que sa série « En suspens » par exemple, peut questionner les limites de la photographie d'identité et le rapport que peut entretenir la photographie de portrait avec la mort.
Avec « Danse contemporaine II », elle fige l'instant où le démembrement du corps permet à l'imaginaire de reconstituer un mouvement.
Le corps n’est pas un outil, contrairement à ce qu’on pourrait penser de prime abord, Annabel l’utilise pour traiter du rapport qu’il entretient à l’image.
Son travail s’inspire et s’inscrit pleinement dans la réflexion photographique. Ses images parlent en effet de la photographie, pour les réflexions plus subtiles qu’elles activent. Elle m’explique que sa série « En suspens » par exemple, peut questionner les limites de la photographie d'identité et le rapport que peut entretenir la photographie de portrait avec la mort.
Avec « Danse contemporaine II », elle fige l'instant où le démembrement du corps permet à l'imaginaire de reconstituer un mouvement.
Expositions.
Après plusieurs participations
à divers festivals, Annabel est lauréate du concours Portfolios organisé par l’Association
Hélio en 2012. Elle exposera l’année suivante sa série « Danse contemporaine » à la galerie Nadar de Tourcoing. La galerie Quai 26 a exposé quelques unes de ses photos en mai de cette année.
Représentée par Mamia Bretesché Gallery à Paris, elle sera exposée au mois de la photo OFF et à la Foire Fotofever, en novembre. Son travail sera également présenté à l’Art Fair de Singapour, à la Biennale d'Oran et à la Morbee Gallery en juillet 2014.
Représentée par Mamia Bretesché Gallery à Paris, elle sera exposée au mois de la photo OFF et à la Foire Fotofever, en novembre. Son travail sera également présenté à l’Art Fair de Singapour, à la Biennale d'Oran et à la Morbee Gallery en juillet 2014.
Merci Annabel, pour ce moment partagé avec toi.
Liens.
Site personnel : http://annabelaounblanco.com/